C’est un homme un peu voûté à l’air sûr de lui qui s’exprime à la barre du tribunal correctionnel de Bruges, ce 16 décembre. Sourcils foncés, le Vietnamien M. Vo Van Hong, 45 ans, se dit lui-même victime d’un mauvais procès. Les « nombreux va-et-vient de personnes asiatiques » relevés par les enquêteurs belges dans ses appartements loués à Bruxelles « étaient pour qu’[ils] se retrouvent tous, pour chanter et boire, c’est dans [leur] culture vietnamienne », explique d’un ton vif ce ressortissant sans papiers aux juges belges sceptiques et parties civiles outrées.
M. Vo Van Hong est accusé d’être le « chef de la cellule belge » d’un clan de passeurs tentaculaire, au terme d’une vaste enquête. Le parquet fédéral belge a requis contre lui 15 ans de prison, ainsi qu’une amende de 920 000 euros d’amende pour, entre autres[1], aide à l’entrée et au séjour irréguliers, trafic d’être humains, direction d’une organisation criminelle. Ces allers et venues répétés entre 2018 et 2020 chez M. Hong seraient en réalité ceux de victimes d’un large réseau de passeurs. Ses deux appartements étaient des « stockhouses », d’après l’investigation, soit des lieux de transit dans le jargon, pour les migrants vietnamiens qui rejoignaient ensuite illégalement l’Angleterre, entassés dans des poids lourds.
M. Hong, arrêté en 2020, serait enfin le maillon de ce système de l’ombre qui a mené à l’affaire macabre dite du « camion de l’horreur ». Le 23 octobre 2019, 39 Vietnamiens de 15 à 44 ans avaient été retrouvés morts d’hyperthermie dans le comté de l’Essex, au Royaume-Uni. Ils s’étaient étouffés, en raison de la chaleur et du manque d’oxygène, dans l’espace confiné d’un conteneur ayant transité par la France, puis le port de Zeebruges, en Belgique. Une enquête internationale avait été lancée au lendemain du drame, impliquant le Royaume-Uni, la France, la Belgique, les Pays-bas et le Vietnam « dans une moindre mesure, tant la coopération de ce pays est faible », regrette une source judiciaire
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