A Nantes un mois après, toujours la même question: «Où est Steve?»

Publié dans Mediapart
Un mois après la disparition de Steve Maia Caniço, plusieurs enquêtes ont été ouvertes. Mais très peu d’informations filtrent. Des proches de Steve, joints par Mediapart, sont déroutés. Plusieurs policiers joints par Mediapart ne comprennent pas les ordres qui ont été donnés.

Un nouveau rassemblement citoyen s’est tenu samedi 20 juillet quai Wilson, sur l’île de Nantes, où Steve Maia Caniço, 24 ans, animateur périscolaire, a été vu pour la dernière fois – c’était le 22 juin. Un mois après sa disparition, les zones d’ombre ne se sont pas dissipées. Joints par Mediapart, des proches de Steve – qui participait ce soir-là à la fête de la Musique le long de la Loire – ne comprennent pas pourquoi si peu d’informations filtrent des enquêtes en cours.

Johanna Rolland, la maire socialiste de Nantes, restée discrète aux premiers jours, est montée au créneau en adressant un courrier au ministre de l’intérieur le 18 juillet. Elle demande de « faire établir et faire connaître, au plus vite, ce qui s’est déroulé lors de cette intervention ». Christophe Castaner lui a répondu ce vendredi en marge d’un déplacement en Eure-et-Loir : « Je pense à [Steve] et à sa famille », ajoutant que « plusieurs enquêtes [étaient] engagées ».

L’enchaînement des faits, dans la nuit du 21 au 22 juin, reste encore flou. À 4 h 30 du matin, la musique avait été interrompue par vingt policiers de la brigade anticriminalité et de la compagnie départementale d’intervention, « sans sommations », précisent les quelque 300 fêtards qui dansaient encore. Au moins une dizaine de grenades de désencerclement, ainsi qu’une trentaine de grenades lacrymogènes ont été tirées entre 4 h 30 et 4 h 50 pour mettre fin aux festivités. Les forces de l’ordre ont également fait usage de LBD.

Au moins quatorze personnes sont tombées à l’eau cette nuit-là sur cette partie du quai Wilson, sans garde-corps. Épaule luxée, brûlures, coups de matraque, plusieurs fêtards ont été blessés pendant l’intervention. De son côté, la police parle de cinq blessés dans ses rangs. Steve n’est plus réapparu depuis.

Plusieurs policiers joints par Mediapart ne comprennent pas les ordres qui ont été donnés d’intervenir, en raison de l’absence de barrière le long du fleuve. D’autant que certains des participants étaient en état d’ébriété. Qui ces jeunes gênaient-ils, loin des zones d’habitation ?, s’interrogent-ils.

Sur l’une des vidéos transmises à Mediapart, qui montre une scène de confusion (voir ci-dessous), on voit un policier courir derrière un fêtard, on entend les cris d’autres jeunes : « Stop, arrêtez-vous ! » Sur les premières images diffusées le 28 juin par le média alternatif Nantes révoltée, on aperçoit au moins un chien. Un participant hurle : « Il y a deux mecs dans la Loire. » L’opération ne cesse pas pour autant.

Aux commandes cette nuit-là : Thierry Palermo, directeur départemental adjoint à la sécurité publique – aujourd’hui à Rennes –, en salle d’opération. Sur le terrain : le commissaire Grégoire Chassaing. Comme l’a révélé Mediapart mercredi, ce dernier avait été décoré quelques jours plus tôt par le ministre de l’intérieur pour son maintien de l’ordre des manifestations des gilets jaunes.

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